Le premier volet du sixième rapport du Groupe intergouvernemental sur le climat, rendu public ce lundi, alerte sur une généralisation des périls liés à l'accélération du réchauffement climatique. L'objectif de + 1,5 degré prévu par l'Accord de Paris sur le climat, à moins d'un effort hors du commun, n'est plus guère tenable Avec l'accélération du réchauffement climatique, la vie va considérablement se compliquer pour les habitants de la planète bleue. Les impacts liés à l'élévation du niveau des températures vont être de plus en plus forts et n'épargneront plus aucune région du globe, prévient le GIEC dans son dernier rapport, rendu public ce lundi. (Shutterstock) Par Joël Cossardeaux A moins qu'elle ne décide enfin d'engager sans attendre un effort titanesque de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), la communauté internationale peut faire une croix sur le principal objectif de l'Accord de Paris sur le climat conclu en 2015 . La limite de 1,5 degré de réchauffement, que cet accord fixe à l'horizon 2100, « sera dépassée au cours des prochaines années », estime le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) dans le premier volet du 6e rapport que cette instance scientifique onusienne a rendu public ce lundi matin et dont une version provisoire avait fait l'objet de fuites dans la presse, fin juin dernier. La ligne rouge a d'ores et déjà été franchie sur la terre ferme avec une hausse de 1,59 °C de la température observée depuis 1850. Ce niveau ne s'observe pas encore dans les océans où le mercure a grimpé de 0,88 °C sur la même période. Mais cela ne saurait tarder car la tendance est loin d'être au ralentissement. Les valeurs affichées sur les thermomètres au cours de la décennie passée ont été en moyenne plus élevées que lors de la précédente. L'homme, principal fautif Une situation imputable à la concentration croissante dans l'atmosphère de CO2, le principal agent des gaz à effet de serre à l'origine du réchauffement. Depuis 2011, leur niveau, en moyenne annuelle, s'élève à 410 ppm, une valeur qui n'a jamais été aussi élevée depuis au moins 2 millions d'années. Pour le GIEC, c'est la démonstration la plus flagrante que les activités humaines sont la cause de la fièvre qui s'est emparée de la planète. Cette responsabilité « est un fait établi », martèle Véronique Masson-Delmotte, coprésidente du groupe de travail 1 du GIEC qui a produit ce rapport fleuve, issu du passage en revue de 14.000 publications scientifiques qui a mobilisé pendant 3 ans plus de 230 experts de 60 pays. Le résumé d'une quarantaine de pages qui en a été tiré pour les décideurs politiques chiffre à 1,07 °C la part du réchauffement due à l'homme. Un réchauffement dont les effets sur le climat s'accélèrent et s'intensifient. Globalement, les fortes précipitations ont augmenté depuis 1950 et leur rythme s'accélère depuis les années 1980. Les pluies se font torrentielles en Europe du Nord, à l'image de celles survenues le mois dernier dans l'ouest de l'Allemagne. Les tempêtes observées sous des latitudes moyennes ont tendance à se déplacer vers les pôles. Les précipitations deviennent de plus en plus fortes dans l'hémisphère sud en même temps qu'elles s'y raréfient et raccourcissent, ouvrant des périodes de sécheresse de plus en plus longues. Des impacts sur toute la planète L'influence de l'homme est aussi, « très probablement », la principale cause du recul inédit des glaciers depuis les années 1990 et de la diminution des surfaces glacées dans les eaux de l'Arctique. Il est tout autant « hautement probable » que le facteur humain ait joué dans la fonte, sans équivalent depuis 2000 ans, de la calotte glaciaire du Groenland observée sur les deux dernières décennies et dans le réchauffement de la couche supérieur (entre 0 et 700 mètres) des mers depuis les années 1970. Les océans ont vu leur niveau monter de 20 centimètres entre 1901 et 2018, avec une accélération du mouvement en fin de période. De 1,3 mm entre 1901 et 1971, la hausse annuelle moyenne de la surface des mers est passée à 1,9 mm entre 1971 et 2006, puis de 3,7 mm entre 2006 et 2018. Sans précédent, les effets du réchauffement climatique n'épargnent aucun point de la planète. Et ce n'est pas fini car le GIEC tient pour quasiment acquise la poursuite à la hausse des températures sur terre comme sur mer, quoiqu'à un rythme moins rapide. « Chaque demi-degré supplémentaire va se traduire par des vagues de chaleur plus longues et plus intenses, des précipitations plus importantes, des sécheresses plus sévères », estiment ses experts. Les submersions marines exceptionnelles, qui jusqu'à présent se produisaient tous les 100 ans, pourraient se répéter tous les ans à la fin de ce siècle. La fonte du permafrost va s'amplifier et les glaces de l'Arctique totalement disparaître en été, signale ce 6e rapport dont la publication s'accompagne de la mise en ligne d'un Atlas interactif permettant de visualiser les données climatiques et leur impact au niveau régional. L'incontournable neutralité carbone Les climatologues du GIEC ont échafaudé cinq scénarios d'évolution du climat pour les décennies à venir. Tous tablent sur une poursuite de la hausse de la température. Dans le scénario le plus rose, le réchauffement pourrait être contenu dans la limite de 1 à 1,8 °C. Après avoir marqué une hausse temporaire de plus 1,5 °C entre 2021 et 2040, le niveau du mercure pourrait commencer à descendre. Mais à la condition expresse d'atteindre la neutralité carbone en 2050, ce qui nécessite d'en passer par une réduction drastique des rejets de CO2. A l'opposé, le cinquième scénario du GIEC, le plus noir de tous, fait craindre un réchauffement compris entre 3,3 et 5,7 °C avec, entre autres effets, d'entraîner une hausse de près de 2 mètres du niveau des océans d'ici 2100. Cette sombre projection se base sur un doublement des émissions d'ici à 2100 par rapport à leur niveau actuel. Dans un scénario intermédiaire, basé sur un gel des émissions jusqu'au milieu de ce siècle, la planète ne pourrait pas couper à un réchauffement de 3,5 °C, très éloigné des 2 °C qui constituent l'objectif minimum de l'Accord de Paris. Joël Cossardeaux
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