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Photo du rédacteurThierry Bardy

Comment Luca de Meo façonne le Renault du futur


Après avoir frôlé la faillite il y a quatre ans, Renault s'est spectaculairement redressé sous la houlette de Luca de Meo. Pour pérenniser le groupe, le patron lui impose une transformation technologique à une cadence jamais vue. Avec de l'IA à tous les étages.

Action ! Derrière la vitre du poste de contrôle, où deux ingénieurs pilotent la machine, un globe de carbone de 90 tonnes monté sur vérins et posé sur des rails commence à bouger. Soudain, la sphère est projetée vers l'avant de l'immense salle de 1.400 mètres carrés et 12 mètres de haut, s'incline d'un côté, de l'autre, revient sur son axe, se stabilise… La nouvelle attraction d'un Luna Park ? Non. Voici « Roads » (pour Renault Operational Advanced Driving Simulator) : un simulateur de conduite inauguré il y a un an au technocentre de Renault, à Guyancourt (Yvelines), où phosphorent 10.000 salariés.

« C'est le plus puissant du monde », s'enthousiasme Olivier Colmard, directeur de la transformation numérique de l'ingénierie. A l'intérieur de l'étrange boule aux allures d'engin spatial, une maquette de voiture grandeur nature accueille testeurs professionnels et automobilistes lambda pour vivre des expériences de conduite virtuelles… bluffantes de réalisme : le véhicule est environné d'un écran à 360 degrés, qui permet de s'immerger dans des scènes de « roulage » comme si l'on y était. De quoi récolter de précieuses informations sur les sensations au volant et alimenter la réflexion pour le développement des prochains modèles. « Aujourd'hui, BMW est le seul constructeur équipé d'un outil à peu près comparable », souligne, pas peu fier, le dirigeant 4.0.

Le simulateur Roads de Renault à Gyancourt, vu de l'extérieur : un monstre de 90 tonnes monté sur vérins et posé sur des rails.

Le poste de contrôle de Roads, au technocentre de Guyancourt. Renault a inauguré ce simulateur de conduite il y a un an.

« Roads » est l'une des illustrations de ce que voudrait être le Renault du futur version Luca de Meo, aux manettes du groupe depuis quatre ans : une « tech company » où logiciels, algorithmes et intelligence artificielle (IA) mènent la danse. Objectif ultime ? Dans les usines comme dans les bureaux, gagner en efficacité, en maîtrise des coûts, en rapidité de développement et en finesse d'exécution. « Renault sera l'une des premières entreprises de la vieille économie à se retrouver intégralement dans le cloud », se félicite le patron qui reçoit dans son bureau du bâtiment X, l'immeuble historique de Boulogne-Billancourt où, en 1919, Louis Renault avait installé le siège de l'entreprise. « D'ici 2025 ou 2026, nous aurons créé un jumeau digital de toute la boîte. L'ensemble des données relatives à son fonctionnement seront accessibles partout et dans la même langue. On va casser les silos. Pour un même fait, on disposera tous de la même information. C'est un truc révolutionnaire, qui nous donne deux ou trois ans d'avance sur les autres ! » s'emballe le boss en blazer bleu, aminci par la pratique assidue du padel…

Scénario de science-fiction

L'organisation est déjà en pleine mutation pour appliquer ce scénario digne de la science-fiction. « On a la base technique, relève Philippe Krief, le nouveau directeur de l'ingénierie du groupe et directeur général d'Alpine. Le reste, c'est du management pur : il faut encourager la créativité, tester, risquer, donner le droit à l'erreur. » Pour l'instant, les équipes adhèrent à fond. Il faut dire que, malgré le contexte de plus en plus tendu sur le marché automobile mondial, les derniers résultats du groupe les y encouragent. Déjà un effet de la digitalisation à marche forcée ?

Le sas d'entrée du simulateur de conduite Roads.

Toujours est-il qu'en 2023, le chiffre d'affaires de l'ensemble constitué des marques Renault, Dacia et Alpine, a grimpé de près de 18 % par rapport à l'année précédente : 52,4 milliards d'euros, pour 2,35 millions de véhicules écoulés. Le résultat net s'est affiché à 2,3 milliards. Surtout, la marge opérationnelle, indicateur phare de la santé de l'entreprise, s'est établie à 7,9 %. Au premier semestre, le curseur est même monté à 8,1 %. « Cela place Renault parmi les constructeurs les plus rentables du moment. Le groupe s'en sort même mieux que certains représentants du premium allemand comme BMW ou Mercedes ! » salue Rémi Cornubert, fondateur du cabinet de conseil en stratégie Strat Anticipation.

A l'intérieur du simulateur, une maquette de voiture grandeur nature accueille les testeurs.

Cette fois, « l'alignement des planètes » cher à Carlos Tavares, le patron de Stellantis, a joué en faveur de son éternel rival… Alors qu'elle avait loupé le créneau si rémunérateur du SUV de segment C (3008, etc.), la marque Renault est repassée à l'offensive et a engrangé les bénéfices de ses lancements et « restylages » opérés depuis 2022. « On a commencé avec Arkana, puis Austral, suivi du nouvel Espace et cette année de Symbioz, énumère le patron du losange, Fabrice Cambolive. La numérisation nous aide à faire des choix plus rapides et variés. » L'emblème a profité de son pari sur les motorisations hybrides, qui a boosté les ventes. « Nous avons choisi un segment gagnant, poursuit le directeur général de la marque. Aujourd'hui, nous sommes les seconds du marché en Europe, derrière Toyota. » Renault a su aussi tenir ses prix. « Il y a eu un effet de rattrapage. Pendant des années, la marque a sous-gagné, elle était à la traîne derrière ses rivaux, privilégiait les volumes plutôt que la valeur et accordait trop de rabais », commente Philippe Houchois, analyste chez Jefferies à Londres.

Il lui reste à réussir son pari dans l'électrique. Une obligation, pour l'inventeur de la Zoe, qui a créé dans le Nord un pôle consacré à l'électrique et aux batteries, baptisé Electricity. Mais pas une mince affaire. Les ventes de Megane et Scenic E-Tech ont déçu. Du coup, Renault fonde ses espoirs dès cette année sur la bonne bouille de la nouvelle R5, l'héritière à watts de l'ex-best-seller, désormais produite à la manufacture de Douai. Elle sera la vedette du stand Renault au Mondial de l'automobile de Paris, du 14 au 20 octobre.

Les caméras du système peuvent générer un environnement à 360 degrés, totalement immersif.Simone Perolari pour Les Echos Week-End

Aujourd'hui, c'est encore Dacia qui, au sein du groupe, offre le profil le plus rassurant. En dépit de sa montée en gamme, accompagnée d'un relèvement des tarifs, la marque reste le chouchou des clients particuliers, un marché plus lucratif que celui des professionnels. Ses ventes ont progressé de près de 15 % en 2023 et la filiale roumaine du groupe compte poursuivre elle aussi, son incursion dans le segment C du business, démarrée avec Jogger. Pour y parvenir, Denis Le Vot, directeur général de Dacia, mise sur une arme de séduction massive : le gros SUV Bigster, lui aussi présenté au salon de Paris. « On refait le hold-up habituel ! » plaisante le patron depuis Berlin où, en ce début octobre, il est allé vanter les charmes du dernier-né (les Allemands adorent Dacia). « Le modèle est équipé de la climatisation bi-zone à l'avant et orientable à l'arrière, d'un vide-poche réfrigéré, d'un toit ouvrant, d'un haillon électrique. Il proposera plusieurs motorisations thermiques et hybrides. Malgré tout ça, le tarif d'entrée sera de 25.000 euros dans le premier cas et de moins de 30.000 euros dans le second, alors que dans cette catégorie de SUV, les tarifs dépassent allègrement les 35.000 euros », énonce le patron à la façon d'un bon camelot.

Les équipes d'Alpine, elles, n'ont pas non plus à rougir des performances récentes de la petite marque sportive du groupe . L'an dernier, les ventes de l'unique modèle A110 et de ses différentes versions ont progressé de 22,1 % (4.328 unités). L'accélération s'est poursuivie en 2024 et la famille s'agrandit. Le label au A fléché s'apprête à faire son apparition dans le créneau des petites voitures avec la A290 électrique, un clone de la R5 fabriqué sur la même plateforme. Et ce n'est pas fini. « En cinq ou six ans, nous allons développer une nouvelle gamme de produits électriques prémium et nous attaquer au segment des allemandes où nous n'étions pas présents », précise Philippe Krief, le directeur général de la marque et directeur de l'ingénierie du groupe…

Au centre de simulation immersive de Renault à Guyancourt, un cobaye teste virtuellement l'ergonomie du cockpit d'une future Alpine.

« Miracoloso », comme on dirait de l'autre côté des Alpes ! Car rappelez-vous : il y a quatre ans, lorsque Jean-Dominique Senard, président du conseil d'administration de Renault et ex-patron de Michelin, débauche Luca de Meo chez Seat, le groupe est au bord du gouffre. Arrestation de Carlos Ghosn au Japon, guerre avec le partenaire Nissan, intérim loupé de Thierry Bolloré, résultats en berne… tout va mal. « A l'époque, on perdait 40 millions d'euros par jour », rappelle Luca de Meo. Un plan drastique avait même été décidé peu avant son arrivée. Il prévoyait 15.000 suppressions d'emploi dans le monde, dont 4.600 en France. Mais il aurait pu être encore plus sévère. Aujourd'hui, Luca de Meo, ancien bras droit de Sergio Marchionne chez Fiat, l'assure : il a empêché la fermeture de certaines usines françaises, alors envisagée.

800 millions d'économies

A la place, son plan « Renaulution » a permis une spectaculaire réduction des coûts, la réorganisation de l'entreprise par marques et par entités autonomes spécialisées et plus souples (électrification, moteurs thermiques, mobilité, logiciels, etc.) et le lancement de nouveaux modèles plus rentables. Pour mener à bien ces travaux d'Hercule, le nouveau patron s'est trouvé un allié de poids en la personne de Gilles Le Borgne, alors directeur technique du groupe. Ce transfuge de PSA avait participé au redressement (miraculeux lui aussi) de Peugeot-Citroën aux côtés de Carlos Tavares,

D'emblée, le Breton barbu a identifié 800 millions d'euros d'économies à réaliser. En 2022, il en était déjà à 2,4 milliards… « Gilles Le Borgne a bien su gérer la mise en commun des composants non visibles par le client entre les différents modèles. En apparence, la gamme est différenciée. Mais en réalité, il s'agit de la même voiture ! »  s'amuse Bernard Jullien, maître de conférences à l'université de Bordeaux. Et voilà comment l'Espace n'est autre qu'un Austral à sept places et le Rafale, un Austral coupé à cinq places… Il n'empêche : au chapitre de la baisse des coûts, rien de plus efficace. Ex-président de Renault, Louis Schweitzer, qui garde toujours un oeil sur son ancienne maison, ne tarit pas d'éloges sur le binôme de Meo-Le Borgne « Le directeur général a remobilisé la boîte, dans l'automobile, c'est critique, et il a su bâtir un plan produit dynamique. Quant au directeur technique, il a remis d'aplomb une ingénierie qui ne l'était plus » , dit-il.

Philippe Krief, directeur de l'ingénierie du groupe et directeur général d'Alpine, photographié en septembre à Guyancourt.Simone Perolari pour Les Echos Week-End

« Sorti des urgences », comme disait Luca de Meo en début d'année, le groupe doit maintenant accélérer pour préparer l'avenir. Avec la technologie comme moteur à réaction, donc. Ses dernières recrues ont ainsi davantage le profil de data scientists et d'ingénieurs en simulation numérique que d'experts en mécanique. « Renault a compris que l'intelligence artificielle était un outil extraordinaire d'optimisation de la performance », observe Rodolphe Gélin, « expert leader IA » du groupe. La mission de cet ancien d'Aldebaran, le cador mondial de la robotique humanoïde ? « Vérifier que tous ceux qui peuvent appliquer l'IA le font. » La plupart des constructeurs exploitent déjà le potentiel de cette technologie. Mais Renault est le premier à avoir créé un « métavers industriel » nourri par des milliards de données récoltées chaque jour dans tous les métiers de l'entreprise, jusque chez les fournisseurs. Grâce à ce ChatGPT interne, qui génère images et textes, les bonnes pratiques sont plus rapidement appliquées partout, les anomalies traquées, qu'il s'agisse de production, de qualité, de consommation d'énergie, de logistique… La démarche aurait permis d'économiser 270 millions d'euros l'an dernier. La cible de 320 millions est visée pour 2025.

Tout commence très en amont. Au lancement d'un programme, l'ensemble des données disponibles sur la future voiture commencent à être stockées dans le cloud et sont accessibles à tous. « Avant, on était en silos, les gens travaillaient sur des versions qui n'étaient pas forcément au même stade d'avancement, ce qui pouvait provoquer des à-coups dans le développement », note Olivier Colmard, le grand manitou de la transformation numérique. Pour des projets chiffrés entre 300 et 400 millions d'euros, le gain de temps rendu possible par cette nouvelle approche en parallèle est plus qu'appréciable. D'autant qu'elle s'applique tous azimuts.

L'IA pour le choix des pièces

Des exemples ? L'IA est désormais utilisée pour accélérer le choix des pièces (de la rondelle de vis au tableau de bord) qui équiperont les modèles en développement. Ce qui n'est pas du luxe : Renault ne compte pas moins de 500.000 composants maison en magasin et ses fournisseurs en ont autant sur leurs étagères. L'IA sert aussi à créer des jumeaux numériques, exactes répliques des véhicules à naître. Les ingénieurs peuvent alors modéliser la manière dont elles seront produites, ce qui permet aux opérateurs de commencer à se former virtuellement au travail sur la future ligne avant même qu'elle n'existe. Plus fort, pour répondre aux exigences d'Euro NCAP, l'organisme européen qui classe les nouveaux véhicules en fonction de leurs performances en matière de sécurité passive, les jumeaux numériques servent à simuler des crash tests avec une incroyable précision. « Dans le passé, on réalisait au maximum 25 crash tests 'en vrai', contre une dizaine aujourd'hui », décrit Olivier Colmard.

Olivier Colmard, directeur de la transformation numérique de l'ingénierie de Renault, photographié à Guyancourt.Simone Perolari pour Les Echos Week-End

Autre avancée : le travail sur l'aérodynamisme ne demande plus de longs et coûteux essais en soufflerie. Auparavant, il fallait une quinzaine d'heures de calcul pour corriger certains paramètres et améliorer le CX (coefficient aérodynamique) d'un véhicule. Aujourd'hui, l'IA permet de réaliser l'opération en quinze minutes. Inutile, enfin, d'emmener des voitures au milieu du désert ou dans le froid polaire pour tester leur résistance et leur comportement en milieux extrêmes. La machine se charge de reproduire les environnements hostiles et évalue la réaction des voitures virtuelles… Même les designers ne peuvent plus se passer de l'outil. « L'IA nous permet de faire des tas de variantes en très peu de temps et avec un degré de réalisme assez exceptionnel », se félicite Gilles Vidal, l'artiste en chef de Renault, vice-président du design…

Alors, bientôt la fin des prototypes, ces voitures en état de fonctionner, très chères, et à qui l'ont fait subir tous les tracas ? « Nous ne sommes pas encore au stade du zéro proto, avec un lancement direct de l'industrialisation, mais on s'en approche », reconnaît Philippe Krief.

Ce n'est pas Thierry Charvet, directeur industriel et qualité du groupe, qui s'en plaindrait. Le plan qu'il applique actuellement, baptisé « full power 2027 », a en effet pour objectif de rendre l'outil industriel plus technologique, moderne et compétitif. « D'ici trois ans, nous allons réduire les coûts de production des véhicules thermiques de 30 % et ceux des voitures à batterie de 50 % », annonce-t-il. Déjà bien avancées sous l'ère Le Borgne, la réduction de la « diversité » (nombre de pièces utilisées dans la fabrication) et l'amélioration du « carry over » (partage de composants entre modèles), se poursuivent, elles aussi.

Dernière illustration en date, la R5 : le modèle compte seulement 1.000 pièces, contre 2.200 pour une Clio ou une Megane E-Tech conçues avant Renaulution. Comme les nouveaux Espace, Scenic, Rafale et autre Duster, la voiture, grâce aux avancées technologiques, a pu être développée en trois ans, contre quatre jusque-là. La future Twingo électrique le sera en deux ans. Quitte à confier une partie du boulot à une entreprise d'ingénierie chinoise, ce qui n'est pas sans inquiéter les syndicats maison…

Mais cette course à l'armement numérique suffira-t-elle à protéger Renault dans la bataille qui s'annonce ? « C'est vrai, le marché se tend, il et ne retrouvera probablement pas son niveau de 2019 et la concurrence est très forte avec de nouveaux entrants chinois », remarque Thierry Charvet. « Mais tout le travail de résurrection et d'ajustement du groupe permet de faire face mieux que d'autres. On a les armes pour se battre », veut-il croire. Par les temps qui courent, c'est préférable. Déjà, le retournement du marché a mis Volkswagen à la peine, Stellantis vient de lancer un avertissement sur ses résultats, Mercedes toussote…

La R5 E-Tech, présentée ici à l'« experience store » parisien baptisé Maison 5.Lucille Pellerin/REA

De plus, une épée de Damoclès menace les constructeurs européens. D'ici à 2025, la réglementation de l'UE leur impose de baisser les émissions de CO2 des voitures neuves de 15 % par rapport à 2021 (81 g/km en moyenne). Faute de quoi, ils devront payer une pénalité de 95 euros par véhicule immatriculé. Pour être dans les clous, pas le choix : il faut pousser les ventes de voitures électriques. Le hic, c'est que depuis l'été dernier le marché de la « watture » s'est effondré en Europe. Diminution, voire arrêt, des aides à l'achat comme en Allemagne, prix élevés, incertitudes économiques… tout cela éloigne le chaland.

« Pour atteindre l'objectif fixé par la Commission, il faudrait réaliser 20 % à 25 % de ventes en électrique. Or, dans la configuration actuelle, on prévoit plutôt un mix de 10 % à 15 %, bref, nous ne sommes pas dans la trajectoire », alerte François Provost, directeur des achats du groupe Renault. Luca de Meo, qui préside actuellement l'ACEA, le lobby des constructeurs en Europe, a pris sa calculette. Selon lui, les amendes pourraient grimper à 15 milliards d'euros. Pour éviter le choc, prévient-il, les constructeurs pourraient renoncer à produire 2 millions de modèles thermiques, ce qui mettrait des usines en difficulté. Il exhorte donc la Commission à revoir son calendrier et à repousser l'échéance …

Une solution consisterait à accélérer la mise sur le marché de produits plus abordables, équipés de batteries moins chères (elles représentent jusqu'à 40 % du coût du véhicule électrique). C'est dans les cartons : CATL et Samsung fourniront à Renault des accus moins onéreux. Mais pas avant 2026. D'ici là, seule l'augmentation drastique des taxes à l'importation en Europe pourra freiner la concurrence des Chinois. Passés maîtres dans la production de véhicules électriques à prix cassés, ils sont en embuscade. Le baptême du feu est proche pour la « tech company ».

Retour à l'Elysée pour le losange

Un signe ? L'été dernier, avant que Stellantis avoue de sérieuses difficultés, l'Elysée annonçait que son parc automobile allait changer d'allure. Voiture officielle de la présidence depuis 2012, la marque DS de Stellantis cédait en effet la place au dernier-né de Renault dans le segment haut de gamme, le Rafale. Le 14 juillet, Emmanuel Macron a donc parcouru le trajet entre le palais de la rue du Faubourg-Saint-Honoré et l'avenue de Friedland, près de l'Etoile, à bord de son nouveau carrosse. « Unique au monde », précise Renault, le modèle « bleu nocturne », blindé comme il se doit, comporte une calandre ornée d'un drapeau tricolore en dégradé, des porte-fanions amovibles et des badges d'ailes bleu-blanc-rouge sur les portes avant. Le SUV Rafale est fabriqué en Espagne. La DS9, qui aurait pu le concurrencer, l'est en Chine. Il n'y avait pas photo !

Le casse-tête des normes

La norme européenne Cafe (Corporate Average Fuel Economy), donne des insomnies aux patrons de l'automobile. Adoptée en 2019 pour lutter contre le réchauffement climatique, cette réglementation impose aux constructeurs des objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre à réaliser en plusieurs étapes d'ici à 2035. Un moyen de les inciter à vendre davantage de véhicules à batterie car, à cette date, les ventes de voitures neuves en Europe se feront uniquement en électrique. Au cours des trois dernières années, le seuil d'émission moyen à ne pas dépasser était de 95 g/km, le calcul étant réalisé sur l'ensemble des ventes de l'année. Chaque gramme excédentaire est sanctionné d'une pénalité de 95 euros par voiture immatriculée. Autant dire que pour les marques, la facture peut vite grimper. La prochaine étape, en 2025, prévoit un objectif moyen de 81 g/km, soit 15 % de moins qu'en 2021. Il passera à 50 g/km dès 2030 (-55 %), puis à zéro en 2035.

Le « crève-coeur » de la F1

Viry, c'est fini. Du moins pour le développement et la mise au point des moteurs de F1. Haut lieu tricolore de la course automobile depuis cinquante ans, le centre Alpine Renault de Viry-Châtillon (Essonne), va en effet changer de registre. Aux 340 salariés du site, la direction a promis des reconversions dans la conception du futur super-car d'Alpine, les batteries de demain, les nouvelles technologies de moteurs électriques. Dans L'Equipe, Luca de Meo a parlé de « crève-coeur ». A son arrivée en 2020, alors que le chaos régnait chez Renault, ce passionné de F1 avait milité pour maintenir l'écurie, rebaptisée Alpine, et à qui le centre fournissait des moteurs. Mais depuis trois ans, les résultats ne sont pas au rendez-vous. L'activité coûte cher : 200 à 250 millions d'euros par an selon de Meo, plus un budget de 150 millions pour l'écurie. Forcé aux économies, le patron a tranché. Dans l'avenir, les bolides Alpine seront équipés de blocs… Mercedes ! D'après Automotive News, l'opération baisserait les « coûts directs » de 120 à 17 millions d'euros.

Jean Botella


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