L. Boi.
La directive CSRD introduit des mesures d'extraterritorialité. Outre-Atlantique, où les républicains multiplient les campagnes anti-ESG, cette nouvelle réglementation inquiète.
Début juin, le Congrès américain a demandé des comptes à Janet Yellen. Comment la secrétaire d'Etat au Trésor a-t-elle pu laisser les gouvernements européens imposer aux entreprises américaines des contraintes si onéreuses en matière de reporting climatique ?
Les deux représentants du Congrès, Tim Scott au Sénat et James Comer à la Chambre des représentants, n'ont pas mâché leurs mots : « Tout effort pour faire progresser l'agenda ESG (Environnement, Social et Gouvernance) de l'Union européenne au détriment des intérêts des Etats-Unis et des entreprises américaines serait contraire au rôle du Trésor […], et constituerait une déviation significative par rapport aux pratiques historiques », écrivaient-ils le 5 juin, dans une lettre destinée à Janet Yellen.
10.000 entreprises non européennes concernées
Leur crainte ? « Le passage à un régime de réglementation climatique de type européen aux Etats-Unis porterait un préjudice matériel et inutile au secteur pétrolier et gazier américain, au secteur agricole et aux marchés de capitaux du pays ». En cause : la fameuse directive européenne CSRD qui bouleverse le reporting extra-financier. Pour la première fois, l'Europe a en effet introduit des mesures d'extraterritorialité.
Le texte qui va entrer en application dès 2024 ne va pas seulement concerner les entreprises étrangères ayant une filiale établie en Europe, mais aussi, à partir de 2028, celles ayant une succursale et celles qui exercent directement une activité importante sur le Vieux Continent. Si les informations requises ne sont pas divulguées, ces sociétés encourront des amendes correspondant à un pourcentage du chiffre d'affaires annuel réalisé dans l'Union européenne. Selon des données de Refinitiv, près de 10.000 entreprises non européennes seront assujetties à cette directive, dont près du tiers sont américaines.
Haro sur la finance durable
La vigilance des membres du Congrès américain est d'autant plus grande qu'un autre texte, la directive sur le devoir de vigilance, encore en discussion, veut contraindre les multinationales européennes et étrangères à respecter, cette fois-ci, les droits humains et environnementaux sur l'ensemble de leur chaîne d'approvisionnement.
Surtout, fin juillet, la Commission des finances de la Chambre des représentants, dominée par les républicains, a adopté plusieurs projets de loi visant « à combattre l'influence des initiatives ESG sur les marchés financiers ». L'un des projets vise notamment à limiter « de façon significative » la réglementation préparée par le gendarme boursier américain sur le reporting extra-financier. Il demande aussi que les entreprises cotées ne fournissent que des informations qu'elles jugent « matérielles », c'est-à-dire pertinentes, sur lESG.
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