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Photo du rédacteurThierry Bardy

« Les start-up sont entrées dans le quotidien des Français »



Charlie Perreau


Le monsieur Start-up du gouvernement se félicite du poids croissant de la French Tech dans l'économie française. Il mesure aussi le chemin à parcourir pour peser durablement sur la scène internationale.

La French Tech n'est plus anecdotique, comment analysez-vous sa croissance ?

Ces chiffres démontrent que nous sommes entrés dans une phase de maturité, même si le chemin est encore long. Celles qui étaient hier de petites entreprises de la French Tech sont devenues un élément essentiel du tissu industriel français, sur la question de l'emploi notamment, et c'est une excellente nouvelle pour l'ensemble de notre économie.

Que retenez-vous au-delà de son poids économique ?

Plus d'un Français sur deux utilise un service ou un produit proposé par l'un des membres du Next40, cela montre aussi que ces entreprises sont entrées dans leur quotidien. Nous nous sommes beaucoup inquiétés pendant le premier confinement de la place des outils proposés par des entreprises américaines, mais l'on peut mesurer toute l'importance de ceux déployés par les jeunes pousses tricolores. L'explosion de la télémédecine et la campagne de vaccination n'auraient pas pu être une telle réussite sans Doctolib.

Que répondez-vous aux critiques d'hégémonie de Doctolib sur son secteur ?

Doctolib résume pourquoi nous mettons autant d'énergie et de moyens dans cet écosystème. Nous avions référencé d'autres acteurs technologiques, mais c'est grâce à sa taille que l'entreprise a pu encaisser le choc des demandes en si peu de temps. Cela ne lui donne aucun passe-droit, elle doit même être d'une certaine manière encore plus exemplaire, mais je préfère que ce soit un acteur français qui se positionne plutôt qu'un Google. Cela démontre à quel point nos start-up sont entrées chez les Français. De manière directe avec Doctolib, Blablacar ou Lydia, mais aussi indirecte, avec des services comme ceux d'OVH, Alan ou Swile.

Comment expliquez-vous qu'un nombre croissant de ces entreprises se situent en dehors de Paris ?

Il y a trois facteurs à cela. Le premier est la dynamique croissante des entrepreneurs locaux qui réinvestissent dans leurs territoires comme Ronan Le Moal en Bretagne ou Olivier Mathiot à Marseille. Le deuxième facteur est le développement de plus en plus rapide des start-up industrielles, qui implantent leurs sites et créent de l'emploi dans les territoires. Je pense à Ynsect et InnovaFeed dans la Somme, Aledia à Grenoble et bien d'autres. Enfin, plus récemment, le confinement a accéléré l'importance d'un équilibre entre vies professionnelles et personnelles. Cela a bénéficié aux autres villes que Paris, notamment pour les populations de développeurs.

Avec le succès de la French Tech viennent les critiques de la « start-up nation », de plus en plus fortes…

Certains voudraient présenter les start-up comme le vecteur d'une nouvelle forme de prolétarisation. C'est un non-sens. Il y a une culture très forte au sein des start-up qui est très positive, comme le partage des responsabilités, de la valeur créée, ainsi que la capacité à imaginer des carrières non linéaires. Les études montrent qu'on y est même mieux payé qu'ailleurs, y compris dans les postes d'ouvrier, avec la nouvelle génération de start-up industrielles et technologiques. La réindustrialisation passera également par les start-up. Evidemment, comme dans tout milieu, certains ne respectent pas les règles. Il faut les sanctionner, mais sans faire de généralisation.

Le modèle des plateformes est-il compatible avec le modèle social français ?

Il faut poser des garde-fous pour s'assurer que les droits essentiels des travailleurs qui fondent la protection sociale perdurent. Mais il faut se garder de vouloir casser le modèle des plateformes. En arrivant, Uber a fait bien plus pour l'emploi dans les banlieues que trente ans de politique de la ville auparavant ! Nous devons faire en sorte qu'il soit plus simple de partager la valeur pour les plateformes de travailleurs indépendants, et que ceux qui recourent à ces plateformes puissent bénéficier des mêmes protections de base que des salariés.

Comment défendre une vision européenne de la tech tout en jouant la compétition entre les grandes villes ?

Il nous faut créer une véritable « marque » européenne dans la tech. Par exemple, en travaillant de concert pour favoriser l'arrivée de talents en Europe, faire converger la fiscalité des entrepreneurs ou mettre en avant les valeurs communes qui sont celle de la tech européenne. Mais la concurrence est également vitale : c'est elle qui nous pousse à être meilleurs. La French Tech est passée devant son homologue allemande pour la première fois l'année dernière. Que l'Allemagne se fixe à son tour l'objectif de nous rattraper est sain et collectivement bénéfique.

L'Europe peut-elle se passer des Américains, de plus en plus présents en tant qu'investisseurs directs dans les start-up ?

Les capital-risqueurs américains sont les bienvenus. Ce n'est qu'un retour des choses, car je rappelle que c'est pour partie le surcroît d'épargne des Européens qui finance la croissance américaine. Mais à terme, il faudrait que nous soyons moins dépendants, notamment pour les grosses opérations. Nous avons besoin d'une industrie française et européenne du capital-risque qui soit forte. C'est l'objectif de l'initiative Tibi [qui soutient l'émergence de fonds, NDLR], mais c'est aussi pour cela que les parcours boursiers de Believe et bientôt OVH seront importants. Il faut que les investisseurs individuels français aient envie d'investir dans les valeurs technologiques françaises.


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